Lilith n'avait pas mit longtemps avant de saisir toute l'importance des temps libres qu'accordait l'orphelinat à ses pensionnaires. Les premiers jours, elle avait juste usé de ces temps pour explorer les environs du bâtiment, puis petit à petit, elle avait découvert le village, non loin de son nouveau domicile. Tout avait l'air terriblement banale dans ce village, en fait, ça ressemblait un peu à la petite ville dans laquelle elle vivait avec ses parents, il y a longtemps de cela. La rouquine avait pu apercevoir la plage, de loin, ces rouleaux bleus turquoise qui avaient fait battre son coeur un peu trop fort, elle était rentrée bien avant la fin du temps libre, ce jour-là.
Mais elle ne comptait pas se laisser dévorer par ses souvenirs. Lilith retourna au village, resta sagement à distance de toute étendue d'eau et entra dans un bâtiment qu'elle avait repéré quelques jours avant. La bibliothèque. Cet endroit aussi lui rappelait des souvenirs, moins douloureux, moins tendres, aussi. Les vieux livres, les grandes étagères, tout ça lui rappelait la maison de sa tante, et ses longs après-midis passer à lire, encore et encore, jusqu'à connaître chaque livre par coeur. Peu à peu, elle oubliait. Il était temps de reprendre les bonnes vieilles habitudes. L'orphelinat n'avait pas le calme dont elle avait l'habitude, et il y avait toujours trop de monde. Alors, oui, la bibliothèque du village semblait être le meilleur endroit pour qu'elle retrouve un peu de sérénité.
La petite rousse déambule tranquillement entre les rayons, observant avec attention les nombreux titres qui défilent devant ses yeux. Elle ne sait même pas ce qu'elle cherche, elle voudrait juste un livre qui titille son intérêt, ne serait-ce qu'un instant. Après plusieurs allers-retours, elle finit par apercevoir un livre, en cuir, à la couverture reliée. Les fleurs du mal est écrit en doré, sur la côté du livre. Cependant, il est presque tout en haut des étagères, et Lilith, du haut de son mètre-quinze est bien trop petite pour l'attraper, même sur les pointes des pieds. Pendant un moment, elle cherche du regard un tabouret, hésite même à se faire une pîle de livres pour être assez grande...Mais ça serait risqué, et à part les chaises devant les tables, à plusieurs mètres de là, qui sont sans doute bien trop lourdes pour elle, il n'y a rien.
Agacée, Lilith finit par sortir du rayon. Peut-être qu'elle peut demander à la dame à l'accueil ? La bibliothécaire acceptera peut-être de venir l'aider...Alors qu'elle avance, elle remarque un homme, visiblement occupé à chercher un livre. Il lui suffit d'un regard pour comprendre que lui est bien assez grand pour récupérer son livre. Bon, il ne reste plus qu'à lui demander, maintenant. La rouquine s'approche donc, un petit sourire aux lèvres, bien différent de ses habituelles mimiques indifférentes, et une fois à sa hauteur, toussote :
« Euh, excusez-moi, monsieur ? Pourriez-vous m'aider à récupérer un livre, s'il vous plaît ? Il est trop haut sur l'étagère pour moi...» dit-elle, avec un petit air désolé.
Tout en parlant, elle ne peut s'empêcher de songer que c'est vraiment rabaissant de devoir se comporter ainsi. Elle n'a pas l'habitude de demander. Elle fait elle-même habituellement, ou bien, elle ordonne qu'on fasse pour elle. Dès qu'elle aura son livre, elle cessera immédiatement cet agaçant petit jeu de rôle.