Je marche dans l’orphelinat. Tout me semble calme. Les enfants doivent être en cours. Je me sens plutôt bien, chose qui ne m’est pas arrivée depuis bien longtemps. Les oiseaux chantent dehors, et le double vitrage ne m’empêche pas de les entendre. Mon prochain cours va bientôt commencer. Je me presse vers mon casier, toujours en étant le plus discrète possible. Je sors mes clefs de mon sac à dos, et prends mon cahier et mon livre de biologie. Je ferme mon casier et me dirige vers l’extérieur afin de profiter encore quelques secondes du beau temps, qui, d’après moi, ne sera qu’éphémère aujourd’hui.

Je suis perdue dans mes pensées quand je me heurte a quelqu’un. Un jeune homme, grand, musclé, avec un bonnet. Je remarque ensuite que sous son bonnet, je me voit pas de cheveux. Mes cahiers me sont tombés des mains au moment où je l’ai heurté. Je me baisse pour les ramasser. Je le regarde dans les yeux. Ils sont vraiment très beaux. J’ai peur qu’Erica ne me prenne la place. Je respire profondément. A cet instant précis je ressent quelque chose ... d’étrange. J’ai l’impression que ... Je ne sais pas. Mon cœur bat la chamade. Le rouge me monte aux joues, mais malgré ça, je me sens bien, terriblement bien. Que m’arrive t-il ?

Je regarde attentivement le jeune homme qui se trouve devant moi. Je ne l’ai encore jamais vu, ou du moins, je n’ai jamais fait attention à lui. Il a pourtant l’air gentil. Le fait qu’il soit chauve me fait penser qu’il est malade, un cancer je pense. Je le regarde de la tête aux pieds. Je remarque que ses jambes ne sont pas identiques. J’ai l’impression qu’il porte une prothèse. Je pense qu’il souffre d’un ostéosarcome, un cancer des os. J’avais, jadis, un ami qui souffrait de cette maladie, il a malheureusement succombé a la maladie.

Je baisse les yeux. Je voudrais lui demander son prénom, mais j’ai peur. Je n’ai jamais fait ça. Non, il ne faut pas que j’ai peur, Erica risque d’apparaitre et de tout gâcher. Je respire profondément et le regarde de nouveau droit dans les yeux. Je prends mon courage à deux mains et lui demande, d’une voix fluette :

-« Dé ... Désolée ... Je ne t’avais pas vu. J’étais ... perdue dans mes pensées. Co ... Comment t’ ... t’appelles tu ? »

Je ne sais pas ce qu’il pense de moi. Sans doute me prends t-il pour une folle. Non seulement je lui fonce littéralement dedans, et en plus je n’arrive même pas a m’exprimer. En tout cas je suis fière de moi, Erica n’a pas encore eu a intervenir une seule fois. J’espère qu’elle ne le devra pas. Je ne veux pas tout gâcher. J’attends sa réponse avec impatience.

Aaron soupira. Assis au fond de la classe, il s'ennuyait à mourir. Il n'avait jamais été très sérieux en cours. Toujours plutôt inattentif, il préférait passer son temps à gribouiller dans ses cahiers plutôt que recopier les leçons que les professeurs dictaient. Surtout qu'il était dans un cours qu'il ne trouvait pas du tout intéressant. Littérature. Il n'avait jamais supporté cette matière, il ne comprenait pas comment les profs pouvaient trouvé des attentions aussi alambiqués à des phrases qui paraissaient pourtant simples. Le prof, Monsieur Loyson, était pourtant sympathique. Mais sa matière n'intéressait pas du tout le jeune homme.
Heureusement pour lui, la sonnerie ne tarda pas à sonner. Il rangea doucement ses affaires dans son sac, laissant les autres Rubans verts sortir avant lui, il n'aimait pas vraiment être bousculé par la foule. Il quitta la salle et commença à se rendre à la salle de biologie, pour son prochain cours. Il préférait beaucoup plus la biologie ! C'était une matière carrée et propre, il n'avait qu'à apprendre pour avoir des bonnes notes. C'était bien loin des dissertations compliqués de littérature ou de philosophie.

Il marcha doucement dans les couloirs, sans vraiment faire attention à ce qui l'entoure, regardant loin devant lui. Il ne vit donc pas la jeune blonde qui marche dans sa direction avant de la percuter. Le choc ne le fit presque pas bouger mais il entendit les livres de la jeune fille tombés. Il baissa son regard vers elle. Elle était plutôt jolie. Elle possédait de longs cheveux blonds et un peu bouclés et ses yeux étaient d'une magnifique couleurs noisettes. Un sourire en coin apparut sur les lèvres d'Aaron. Oui, il la trouvait définitivement jolie. Il la vit se baisser pour ramasser ses livres et il fit de même, l'aidant à réunir ses affaires.
Ils se relevèrent tous les deux et il sentit qu'elle le regardait, s'attardant particulièrement sur sa prothèse et son crane – enfin son bonnet. Il aurait soupiré normalement dans cette situation mais étonnamment, la jeune fille devant lui ne semblait pas avoir pitié ou être dégoutté par les parties étranges du corps d'Aaron qu'elle observait. Il lui tendit un de livres – celui de biologie, qu'elle avait fait tombé. Elle était donc dans sa classe. Il n'avait jamais fais vraiment attention aux personnes de sa classe – à part à ses amis évidemment. Il s'étonnait quand même de ne jamais avoir remarqué une fille aussi mignonne. Elle rougit en l'observant, bégayant une excuse et sa question.
Il lui tendit son livre en répondant :

« Je m'appelle Aaron. Aaron Rowe. Je suis dans ta classe. »

Il lui sourit, toujours de son petit sourire en coin.

« Et tu es ? »

Il s’appellait Aaron. C’était un très joli prénom, cependant peu commun. Il était donc dans sa classe. Elle ne l’avait pourtant jamais remarqué. A vrai dire elle ne faisait pas vraiment attention aux personnes qui l’entouraient, elle portait plus d’attention aux personnes qui l’habitaient qu’aux personnes qui l’entouraient. Il lui demanda a son tour de se présenter.

-« Enchantée, moi c’est Heïdi. Heïdi Brooks. »

Le jeune homme avait l’air très gentil, c’était sans doute pour cette raison qu’Erica ne s’etait pas encore manifestée. Elle espérait d’ailleurs qu’elle ne le ferait pas car le jeune homme pourrait avoir peur. Elle jeta un nouveau coup d’œil au bonnet, mais elle ne se laissa pas attendrir. Au contraire, ce dernier éveilla sa curiosité :

-« Tu as un cancer ? » demanda t-elle curieuse mais sans vouloir être indiscrète.

Elle attendait un réponse précise. Elle regarda le jeune homme, dans les yeux cette fois-ci, et lui dit qu’il faudrait sans doute qu’ils aillent en cours. La jeune fille lui demanda en qu’elle salle ils étaient, car a vrai dire elle ne savait pas par où ils devaient aller. Elle fit demi tour et partit en direction de la salle de cours, le jeune homme a ses côtés.