"Observer attentivement, c'est se rappeler distinctement." [PV Jun & Nate]

Les élèves se précipitèrent tous vers la sortie de la salle de classe. La sonnerie annonçant la fin des cours avaient finis par retentir, au grand soulagement des élèves, heureux d'enfin pouvoir vaquer à leur occupation. Nate, le professeur de littérature, avait lui-aussi accueilli la sonnerie avec joie. Ce n'est pas qu'il n'aimait pas enseigner, ou qu'il n’appréciait pas ses élèves, c'est juste qu'il était dix-sept heures et que la journée lui avait parut longue. Il était nouveau ici et il avait encore un peu de mal à se familiariser avec son nouvel environnement. De plus, le temps était maussade. Il faisait gris, sans aucune soleil et des fois, il pleuvait. Ce n'était même pas une vraie pluie mais plutôt un crachin désagréable, qui s'infiltrer sournoisement dans les vêtements. Il soupira, effaçant le tableau des quelques notes qu'il a écrit durant le dernier cours du jour. Il devait pourtant avoir l'habitude d'un tel temps, étant donné toutes ses années à vivre en Angleterre.

Il s'assit à la chaise derrière le bureau de la salle de classe et sortit quelques documents de sa mallette. Il voulait potasser un peu ses cours du lendemain avant de retourner dans sa chambre du pensionnat. Il avait décidé de s'installer là, le temps de se faire à sa nouvelle vie, avant de peut être déménager dans le village proche de l'orphelinat. Il sortit donc quelques feuilles et un stylo. Il allait commencer à aborder la littérature gothique avec ses élèves les plus âgées. Il pourrait parler d'un de ses auteurs préférés de cette façon : Edgar Allan Poe. Il se plongea alors dans une époque sombre du XIXe siècle, se mariant parfaitement avec le temps de cette journée.

Jun n'était pas encore sortie de la salle de classe. L'adolescente avait - pour tout dire - la flemme de tout. C'était la fin des cours. Il n'y avait plus rien à faire de sa journée. Et s'ennuyer comme ça, c'était quelque chose que Jun haïssait. Se livrer à elle même, par la pensée simplement, c'était quelque chose qu'elle ne pouvait pas se permettre de faire. Penser pour elle, c'était se livrer à la noirceur qui se tapissait dans sa vie insensée. Enfin bon. Là n'était pas le moment de penser à... Penser ? Tout le monde était déjà partit. Et il était peut-être temps pour elle d'en faire de même. Elle s'empara de son sac de cours, à la manière la plus lasse qu'il soit, et c'en fut tellement exagéré que Jun donna l'impression d'essayer de se prouver toute seule à quelque point sa vie était ennuyante.

Le professeur n'avait pas posé ses yeux sur elle. Heureusement qu'il n'avait pas bougé de la salle d'ailleurs. Parce que dans ce cas là, Jun aurait eu vite fait de rester enfermée à l’intérieur de la salle tellement elle passait pour invisible. Evidemment, repartir comme ça aurait été bien trop facile. Non, il fallait que Jun fasse encore quelque chose d'anormal pour pouvoir sortir du cercle vicieux de son quotidien. Elle jeta un œil avertit vers la paperasse dont semblait s'occuper son professeur. « Woow monsieur ! Vous comptez faire un cours sur Edgar Poe ? » Ce fut trop impoli d'aborder un professeur comme cela... Mais... S'en préoccupait-elle ? Non ! Pas le moins du monde.

Jun voulait juste voir ce que son professeur faisait. Et pourquoi pas engager la conversation ? Et pour tout dire, si elle ne le faisait pas, elle aurait vie fait de s’énerver. Tout avait le don de l'irriter de toute façon. « En fait... Je voulais savoir... Vous n'auriez pas un bouquin à me conseiller que je puisse me procurer ? Je suis en manque de lecture et de tout autre occupations ces temps-ci. J'en ai marre de m'ennuyer. » Mais tous les adultes disaient les même chose « S'ennuyer, c'est bon pour la pensée. » « Mais moi j'aime pas penser. Je veux l'occuper ma penser. » L'adolescente n'avait-elle pas peur de paraître étrange ? Non. N'avait-elle pas autre chose à faire que de raconter sa vie au premier venu ? Non, elle avait juste une grande buche... C'est tout... Mais bon, elle verrait bien ce que lui dirait son professeur.

Nate releva la tête vers l'élève encore présente. Il était surpris, il ne l'avait pas remarqué avant. Il observa son visage quelques instants. D'après ses traits significatifs, il pouvait déduire qu'elle était d'origine asiatique. Il resta quelques longues secondes à l'observer, cherchant son nom dans sa mémoire. Il se remémora du seul nom à consonance asiatique présent sur la liste des élèves de cette classe.

« Tu es... Jun, c'est ça ? »

Il l'observa encore quelques instants avant de répondre à sa question.

« Oui, je comptais aborder la littérature gothique avec vous. Edgar Allan Poe en est le meilleur exemple de mon point de vue. »

Il laissa tomber son stylo et s'installa plus confortablement dans sa chaise.

« Il est difficile de te conseiller une lecture sans connaître tes goûts en matière de littérature. Quel style aimes-tu? Je te conseillerais de lire du Allan Poe si tu veux te familiariser avec les cours prochains. J'aime particulièrement la littérature anglaise, alors je pense que je te conseillerais beaucoup d'auteurs britanniques. Quelques français me viennent aussi à l'esprit mais il faudrait que tu saches lire le français... Je n'aime pas lire une traduction d'une œuvre, bien que j'en sois souvent obligé. Les traductions n'ont souvent rien à voir avec les œuvres originales. Après, je connais des auteurs de tous les styles : fantastiques, science-fiction, policier... »

Il arrêta de parler un instant. Il devint gêné de son flot de paroles incessants, sans queue ni tête. Il regarda la jeune élève.

« Je suis désolé, je parle beaucoup trop quand on aborde la littérature...»

Bon sang ! Il était un adulte, un professeur ! Il devait arrêter de se ridiculiser devant des élèves, il devait se calmer. Peut être que reprendre de l'Aderall lui ferait du bien? Il ne voulait pas redevenir hyperactif, ça jamais ! Un adulte hyperactif, c'était ridicule. Il souffla légèrement pour se calmer, reprenant contenance devant Jun.

« Oui, je suis bien Jun » Rétorqua-t-elle sans arriver à cacher la gêne liée au fait qu'un professeur n'avait pas encore retenu son nom. Elle l'observa, professeur intéressé qu'il avait l'air d'être. Oui, c'était assez rare... Tous les professeurs les plus caricaturaux dont l'adolescente avait pu entendre parler n'étaient pas du tout de cette trempe et se laissaient facilement aller à la mélancolie du triste métier de garderie qu’ils devaient exercer. Enseigner à des enfants qui n'en avaient que faire des leçons qu'on tentait de leur inculquer avec grand plaisir devenait facilement un supplice avec l'âge. Mais monsieur Loyson, lui, était encore jeune. Il aurait été étonnant pour l'orientale d'avoir affaire un professeur déjà fatigué de son métier. Non seulement il était jeune, mais en plus il aimait son travail. Alors oui, sans gêne, Jun pouvait affirmer qu'il tiendrait plus longtemps le coup. Mais qu'il finirait aussi par craquer.

« Je vous cacherais pas que je suis pas fana de « graaaande » littérature, je dirais que le genre fantastique est vraiment celui que j’affectionne le plus, mais certains autres auteurs renommés aussi m'intéressent beaucoup ! Comme Charles Baudelaire, ou même J.D Salinger, et j'aime beaucoup ce qui appartiens au genre de l'absurde aussi... Mais je ne m'y connais pas vraiment beaucoup... On a pas l'occasion de beaucoup sortir, et du coup d'aller se cultiver... C'est pour ça que je compte beaucoup sur les cours ! » Lui fit-elle de son air angélique d’enfant cachant son manque de travail et d’efforts.

Jun ne put s’empêcher de sourire à la dernière remarque de son professeur qui avait l’air gêné de s’être autant exprimé. Pour elle, il ne faisait que lui donner des informations complémentaires sur son étonnant attachement à la littérature. Et justement, cela lui plaisait bien. « Soyez pas gêné ha ha ! Moi j’aime bien justement voir à quel point vous aimez lire ! Ça me donne d’autant plus de raison d’être contente d’être venue vous parler ! D’ailleurs, c’est quoi votre livre préféré ? Je pense que ça irait comme premier conseil ! » Enchaîna-t-elle avec un grand sourire. Jun se doutait qu’elle allait rester dans cette salle pendant plusieurs minutes maintenant. Elle s’assit sur la table la plus proche du bureau, et tout naturellement, ses jambes se balancèrent en dessous de son support.

Jun trépignait, elle était bien heureuse d’avoir ce genre de discussion avec d’autre, et en toute honnêteté, ça lui avait manqué tant de contact. Surtout aussi intéressant que celui-là. Elle mourrait d’envie de parler encore et encore, même si pour cela leur sujet devait dériver. Mais bon, cela gênerait peut-être le professeur étant donné qu’il semblait plongé dans ses préparations de cours avant qu’elle ne l’aborde.

Nate regarda la jeune adolescente s'installer. Un peu de compagnie ne lui ferait pas de mal et puis, il trouvait la jeune japonaise très sympathique, bien qu'un peu trop ouverte pour lui. Il était plus réservé qu'elle, surtout avec les élèves. Il était tout de même gentil et sympathique mais il n'allait pas jusqu'à être chaleureux avec ses différentes classes. De plus, cela faisait à peine plus d'une semaine qu'il était là et il n'était pas encore très à l'aise, n'ayant pas encore cerné tout à fait le caractère de ses nombreux élèves. Néanmoins, il appréciait la franchise dont faisait preuve la ruban verte.

« Je comprends qu'à ton âge, on ne s’intéresse pas à la « grande » littérature, comme tu dis, dit-il avec un sourire bienveillant. J'aime également beaucoup le style fantastique mais mon livre n'en ai pas un. Je ne vais pas être très original mais mon œuvre préféré est Les Dix Petits Nègres d'Agatha Christie. C'est un livre policier, j'ai du le lire quand j'avais environ ton âge et depuis, il reste mon préféré. »

Il se remémora la première fois qu'il l'avait lu. Il était au lycée à cet époque et souffrait encore de son hyperactivité. Cela avait été le premier livre à avoir réussi à garder son attention. Il en avait été surpris, il n'avait pu s’arrêter de lire que le lendemain matin, quand il l'avait fini, totalement épuisé. Autant dire que la journée qui suivit ne fut pas fameuse pour lui, il avait dormi toute la journée, pendant les cours.
Après ça, il s'était procuré de nombreux livres d'Agatha Christie qui lui avait fait le même effet que le premier. Puis il avait découvert de nombreux autres auteurs, pour la plupart britannique. C'est à ce moment-là qu'il décida qu'il voudrait vivre en Angleterre. Son affection resta néanmoins toujours pour la première œuvre qu'il avait lut et qu'il lui avait permis de commencer à soigner son hyperactivité si gênante pour lui.

« Tu sais, quand j'étais au lycée, j'étais hyperactif et ce livre m'a permit de commencer à me défaire de ça. Je pense que je l'aimerais à tout jamais, rigola-t-il légèrement. »

Il ne savait pas pourquoi il avait avoué cela à son élève. Peut-être était-ce son sourire ? Ou bien était-ce simplement qu'il avait bien envie de parler à quelqu'un, lui qui avait eu si peu de contact depuis son arrivée dans cet orphelinat ?...

Si Jun était bien sûre d’une chose, c'était que la situation qui s'était installée entre elle et un professeur était pour le moins bien étrange. Ou plutôt inhabituelle. L'élève ouvert et le professeur légèrement renfermé. Enfin non. Il n'était pas renfermé, mais disons qu'il était... Enfin. Pour faire court, il suffirait de s'imaginer le scénario d'un professeur très ouvert et sociable - le professeur de base dirais-je - en train de parler avec un élève un tantinet timide. C'est un scénario assez basique, n'est pas ? Eh bien là, ce qu'on observait, c'était tout l'inverse. Pourtant, Jun sentait qu'il fallait mettre ce professeur en confiance. Elle voyait bien qu'il semblait mené par une volonté plus forte que la plus part des autres, et elle ne voulait pas laisser passer cette occasion. Entre la directrice et les élèves turbulents issus des autres classes, il aurait été dommage de gâcher l'esprit de monsieur Loyson. Vraiment.

« Un livre d'Agatha Christie ? Pourquoi pas ! Je n'ai pas beaucoup lu policier ! Enfin, je me souviens avoir lu un bouquin d'Isaac Asimov ! Vous savez, le cycle des robots tout ça tout ça, et là c'était "Face aux feu du Soleil" C'est peut-être pas très original comme seule lecture de roman policier, mais bon, je suis assez contente d'avoir lu ce livre ! » Jun était assez contente de pouvoir parler de ce genre de chose avec son professeur. Elle ne cessait de se le répéter, mais ça lui faisait vraiment plaisir de tenir une conversation aussi constructive. Et l'asiatique le savait, lorsqu'elle toucherait à ce livre, elle ne pourrait pas s'empêcher de le lire en pensant à son professeur, en pensant à l’œil qu'il devait avoir sur sa lecture, en pensant aux impression qu'il devait avoir. C'était assez stressant de s'en rendre compte, mais bon, ça ne devait en aucun cas lui empêcher une lecture tranquille.

C'était curieux qu'il lui avoue un tel fait. Jun ne comprenait pas vraiment pourquoi un professeur s'ouvrait comme cela, surtout que tantôt, elle se rendait compte à quel point il était réservé. Soit, elle l'avait peut-être malgré elle mit en confiance, et c'était bien drôle d'ailleurs, parce que c'était ce qu'elle voulait. Mettre en confiance monsieur Loyson pour qu'il puisse vivre dans cette établissement de la meilleure manière qu'il soit. Elle avait jeté son dévolu sur lui il fallait croire. Et si elle tenait à venir en aide aux autres, Jun n'avait jamais été aussi active. Mais là n'était pas le plus important. Elle se rendait compte que le professeur lui avait dévoilé un fait qui se voulait gênant, et dans la meilleur des entreprise possibles, elle sourit, et répondit le plus calmement du monde « Ah ouais ! Je vois ! Ça devait être dure de mener une vie hyperactive, comme quoi les livre c'est juste absolument génial... » Ce après quoi elle rit tranquillement, comme apaisée.

Si l'heure était aux dévoilements, pourquoi n'irait-elle pas un pu parler d'elle ? Elle ne savait pas comment c'était possible d'autant s'entendre avec un professeur, mais il fallait croire que cela l’était. Alors elle enchaîna, plus enthousiaste, faisant le lien avec sa propre existence. « On ne peut pas dire que je sois hyperactive de mon côté, ça c’est sûr, mais disons que depuis la mort de mes parents, j’ai bien changé. Je suis devenue plus… Enfin… Vous savez… J’ai l’impression que j’exagère tout le temps ce que je ressens ! C’est marrant hein ? » Même si elle ne trouvait pas les mots, elle ne pouvait s’empêcher de lui sortir un trucs aussi débile. Et d’en rire. Mais bon, si ça pouvait lui faire parler un peu, elle n’hésitait plus. Bien évidemment, cette phrase cachait tout aussi bien une de ses envies de reposer des questions sur la vie de son professeur, mais elle ne le fit pas.

C’était bien inutile puisque cette discussion s’enchaînerait surement sans problème. Alors elle continua, sur la même lignée, en reparlant de bouquin. « C’est vrai que les livres ça aide beaucoup. Quand je lis, je me sens transportée dans une histoire qui aurait pu être la mienne dans une tout autre dimension, et je ressens tout ce que ressent un personnage. Ça me fait vraiment bizarre d’avoir l’impression d’être lui, et j’aime franchement la lecture pour ce genre de sentiments qu’on en perçoit. Simplement ça calme les esprits, ou les secoue, et ça nous fait voir les choses différemment, nous fait prendre du recul. Et bref, je m’enfonce dans des explications peut-être incompréhensibles en fait… Mais voilà, c’est une partie de ce que je ressens en lisant ! » L’orientale n’avait peut-être pas fini de parler de ses ressentit, mais c’était bien suffisent. Après tout elle pensait que tout lecteur avertis qui se respectaient devait comprendre ces émotions.

Nate écouta la jeune fille parler avec un grand sourire. Les sentiments qu'elle décrivait, certes de façon un peu brouillon, étaient les sentiments que tout lecteur ressentait. Pour une adolescente, Jun était quelqu'un avec une psychologie que Nate pouvait tout à fait apprécier. Elle s'était ouverte à lui en parlant de la mort de ses parents et le fait qu'il se trouvait dans un orphelinat revint à l'esprit du professeur. Malgré sa bonne humeur et son enthousiasme, Jun était une orpheline. Il admirait son courage pour arriver à tenir le coup malgré la perte de ses parents, il ne pense pas qu'il aurait eu le courage de sourire et de rire si ses parents à lui étaient morts quand il avait seize ou dix-sept ans. Enfin, si cela avait été le cas, peut être qu'il se serait plongé dans la littérature avec encore plus de désespoir qu'il ne l'avait fait quand il était jeune.
Nate avait haït son adolescence. Il avait haït les moqueries, les regards, les coups qu'il recevait parfois. Il avait été différent. Aujourd'hui, à cet instant précis où il se rappela que l'adolescente qui lui faisait face avait grandi sans ses parents, il se sentit misérable pour ce qu'il éprouvait. Il avait vécu une bonne vie, malgré ce qu'il ressentait vis-à-vis de son adolescence. Il s'en voulait un peu de penser de façon si égoiste. Nate secoua la tête légèrement, ce n'était pas vraiment le moment de ressentir ce genre d'émotion, il aurait tout le temps de se sentir pathétique quand il serait seul.

« Tu sais, les sentiments que tu décris, c'est ce que nous tous, lecteurs, ressentons. Il y a une citation de Georges R.R. Martin que j'apprécie particulièrement qui résume parfaitement cette pensée : "Un lecteur vit mille vies avant de mourir. L'homme qui ne lit pas n'en vit qu'une.". Cette citation est exactement ce que je ressens face à la littérature, je ne pourrais mieux illustrer ma pensée que par ces mots. A chaque fois que j'ouvre un livre, je me plonge toujours dans un univers différent et c'est ce que j'apprécie le plus dans la lecture. Je pense que quand j'étais encore un adolescent hyperactif, me plongeait dans un autre monde me permettait de m'éloigner de cette hyperactivité qui était très gênante pour moi à l'époque. En voyant l'effet qu'avaient les livres sur mon caractère, j'ai décidé de lire toujours plus pour finalement m'orienter dans des études liés à la littérature. »

Nate se replongea quelques instants dans ses souvenirs. Il avait passé tellement d'heures dans des bibliothèques à dévorer des centaines d'ouvrages ou bien au milieu de sa chambre, entouré par toutes ses nouvelles trouvailles littéraires. Il revint ensuite à la réalité et regarda la jeune fille avec un sourire.

« Je sais que tu es encore jeune mais... Tu sais déjà ce que tu veux faire, plus tard ? Tu en as déjà une petite idée ? »

« Wooow ! Mais d'où elle vient cette citation ? Elle est géniale !! Mais oui, ça résume tout à fait cette pensée. J'me sens assez rassurée de voir que beaucoup de personne aimant ire voient la lecture sous cet angle ! » Puis elle songea à l'effet que la lecture avait eu sur son professeur. C'était sûre, si Jun lisait plus, elle aurait beaucoup moins de mal à contenir son caractère versatile. Beaucoup, beaucoup moins de mal. Et sur ce point-là, les deux devaient bien se comprendre. « J'vais prendre exemple sur vous et lire beaucoup plus. C'est vrai que j'ai parfois l'impression que le calme ne me ferait pas de mal. Enfin, vous comprenait bien ça ! »

Soudainement le sujet dénigra. Enfin, pas vraiment puisque le professeur avait parlé de son orientation. Et ce fut une question assez pertinente d'ailleurs. C'est sûr, elle intéressait facilement les professeurs, mais les élèves ne savaient pas forcément y répondre. Jun tenta de répondre, avec le peu de moyen dont elle disposait. « Je sais pas vraiment je dois l'avouer, mais il y a quand même un domaine qui pourrait m'attirer. J'en ai déjà parlé avec quelqu’un, mais vraiment, j'aimerais bien rester dans cet orphelinat ou n'importe quel autre orphelinat quoi, et y travailler. Peut-être être une psychologue... Je sais pas trop. » C'était dit. Bon, c'était certainement bien naïf comme idée, mais Jun le savait. L'asiatique avait toujours eu cette étrange empathie qui la posait à vivre sur l'appui de sa générosité. C'était une vie un peu égoïste, mais elle était comme ça. Bien sûre égoïste, parce que c'était simplement pour satisfaire les sentiments néfastes qu'elle éprouvait à la place des autres.

Bien sûr que non, Jun ne détestait pas parler de ce genre de chose, mais elle ne pouvait pas cacher que ça la gênait. Et elle ne le cachait pas ! C'était simplement son ton qui en attestait. Ça la gênait, tout simplement parce que ses idées à ce sujet n'étaient pas clair. Et forcément, lorsqu'une idée n'est pas claire, elle est difficilement formulable. Et Jun, eh bien c'est une adolescente spontanée. « J'dois vous avouer que j'ai du mal à parler de ce genre de chose, parce que j'ai pas vraiment les idées fixes. Enfin voilà. Mais ça me fait penser ! Je me demandais, si je suis pas indiscrète, quelles genre d'études vous avez fait pour atterrir dans un orphelinat comme ça ? »

Nate aimait beaucoup l'adolescente qui lui faisait face. Plus elle parlait et se confiait, plus elle lui rappelait lui-même à son âge, alors que son hyperactivité le faisait dire tout ce qu'il lui passait à l'esprit.

« Tu penses devenir psychologue dans un orphelinat donc... C'est très noble de ta part, bien que je puisse comprendre pourquoi tu veux t'orienter dans cette voie. Si je peux te conseiller une chose pour l'avenir, c'est que si tu en as la volonté nécessaire, fait le maximum pour y arriver. J'ai eu beaucoup de mal pour obtenir mon diplôme, j'ai dû me débarrasser de mon hyperactivité avant. »

Il se souvint de ses années à la faculté, en Angleterre. Ses parents avaient acceptés qu'il parte chez la nation au Nord de la France, à son grand étonnement. Mais ils avaient compris que c'était ce qu'il voulait faire, à tout prix. Il avait suivis des séances pour se débarrasser de son hyperactivité, avait pris de plus en plus d'Aderall, un médicament contre les troubles de l'attention, ce qui lui avait posé quelques problèmes de somnolence pendant les cours, et il avait lu. Beaucoup. Longtemps. Se privant même de sommeil parfois. Il lisait. Et il avait réussi à se débarrasser de son hyperactivité et de ses troubles de l'attention.

Par contre, malgré cela, il avait toujours la mauvaise habitude de se plonger dans ses souvenirs en plein milieu d'une conversation. Sérieusement, il n'avait même pas trente ans et il se comportait comme un grand-père. En plus, il avait une façon étrange de parler anglais, avec de vieux mots et expressions. Enfaite, d'après les personnes qu'il avait côtoyé en Angleterre, il parlait trop bien et il n'avait jamais réussi à se débarrasser de ça, malgré le temps à vivre dans un pays anglophone. Il revint à la réalité à la question de Jun.

« Et bien... J'ai un simple diplôme de lettres à vrai dire. J'ai fais ma thèse sur la littérature anglaise, d'ailleurs. Ça, ça ne doit pas trop te choquer, rit-il. Hm... Mais à part cela, je n'ai rien fais de particulier pour être venu dans un orphelinat. »

Il se demanda soudainement quelque chose mais se sentit gêné de poser la question.

« Je ne veux pas être indiscret, et si tu ne veux pas répondre, tu n'as pas à le faire. Depuis combien de temps es-tu dans cet orphelinat ? Enfin, je sais que ça doit être difficile de parler de ça alors excuses-moi si cela te gêne ! Ne réponds pas si tu ne veux pas ! Je suis désolé de poser cette question à vrai dire...»

Un sourire s’esquissa sur les fines lèvre de l'orientale. Comme plusieurs fois depuis tantôt d'ailleurs. Elle n'arrêtait pas de sourire, comme si elle devait supporter tout le bonheur du monde sur ses trop frêles épaules, et que tant de poids lui crispait le visage sur cette joie de force.
Il était gentil ce professeur. Et un peu trop d'ailleurs. Jun avait des papillons dans le ventre, et c'était le cas de le dire. « Vous êtes bien motivant ! Je commence à être de plus en plus sûre de ce que je vais faire plus tard maintenant ! » Le complimenta-t-elle les yeux clos, clichés de l'asiatique heureuse.

Effectivement, son parcourt professionnel n'avait pas été aussi classe qu'elle l'aurait pensé, mais il aurait était idiot de sa part de continuer de penser que tout pouvait être parfais dans la vie de quelqu'un. elle acquiesça simplement à sa réponse, et comme si leur discussion n'était qu'une succession de question réponse, elle se prépara à la suite.
« Mais arrêtez de croire que ça puisse nous blesser à chaque fois quand on parle de ça ! » Elle se mit à rire. « C'est comme si vous aviez perdu quelqu'un il y a voila plus de la moitié de votre vie ! Même si il vous était chère, vous le surmontez non ? 'Fin, ça ne marche peut-être qu'avec les gens jeune, mai vous êtes jeune aussi, alors vous comprenez ? » Elle racontait un vrai charabia dans son excès d'humeur. Mais tant pis si on ne la comprenait pas, elle se contenta de poursuivre.

« J'avouerais que ça me fait quand même un petit peu de mal... » Elle effaça son sourire. Elle parlait vraiment comme une enfant ! « Mais pas au point de se voir sur mon visage toujours souriant hein ? Hein ? » Jubila-t-elle en retrouvant son sourire et l’arquant de plus belle. « Bref, faut vraiment que j'arrête ! » Jun se mit à rire. Elle en avait oublié de répondre. Elle et son expressivité trop marquait pouvait vraiment passer pour une idiote !

« Il commence à être tard ! faut aller manger... J'ai pas sérieusement envie d'y aller, je voulais passer à la bibliothèque moi ! J'aurais encore aucun bouquin à me lire ce soir... » Elle n'en avait pas conscience, mais cette phrase faisait vraiment comprendre un drôle de message. " Prêtez moi un livre ! Prêtez moi un livre ! " Ou peut être qu'elle le faisait vraiment exprès. Comment le savoir avec son air espiègle ?

« He ! Mais je vous ai pas répondu en fait ! » Elle se gratta le crâne et se mit à rire nerveusement « J'ai perdu ma famille quand j'avais sept ans... Alors maintenant ça doit faire... » Elle commençait ridiculement à compter sur ses doigts, alors que si elle avait dix-sept ans... La réponse était évidente.

That précision débile à ajouter xD :

Nate fut un peu surpris du comportement de la jeune asiatique qui lui faisait face. Elle était vraiment... volubile ! Elle lui rappelait un peu lui quand il était adolescent. Peut-être était-elle elle-aussi hyperactive ? Ou sinon, c'était juste son caractère qui était comme ça.

« J'ai pris beaucoup de temps à découvrir ce que je voulais faire, pour ma part. Quand j'avais ton âge, je n'avais aucune idée quand à mon avenir. Ça a été vraiment une période stressante de ma vie. En plus, avec mon hyperactivité qui me gênait beaucoup, ça rajoutait encore des difficultés à ma vie. »

Il s'empourpra en se rendant compte de ses paroles.

« Désolé, je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça, dit-il dans un sourire gêné. »

Il continue ensuite, plus calmement :

« Je comprends ce que tu veux dire. Mais tu sais, je ne suis plus aussi jeune que ça, rit-il, pour détendre l'atmosphère, j'ai déjà trente ans, soupira-t-il, en se rendant compte que oui, il vieillissait. »

L’excès d'émotions de la jeune asiatique fit sourire le professeur, elle ressemblait vraiment à une enfant, c'était amusant. L'image de sa jeune sœur lui traversa l'esprit et il se rendit compte qu'il commençait à éprouver pour son élève le même genre d'affection qu'il ressentait envers sa jeune sœur. Cela devait bien faire une année qu'il ne l'avait pas vu d'ailleurs, il devrait lui passer un coup de fil pour prendre de ses nouvelles.

La réflexion sur l'heure que fit la jeune fille surprit Nate, il ne pensait pas qu'il était aussi tard et qu'il avait passé autant de temps à parler.

« Si tu veux, je peux te prêter un livre, sourit le professeur, engageant. J'ai ici un recueil de nouvelles d'Edgar Allan Poe, tu le veux ? »

Il tendit le livre à la jeune fille. De toute façon, il n'en avait pas besoin pour préparer son cours, ayant un double exemplaire. Et puis, cela aidera la jeune fille à capter les prochains cours de littérature. Nate éprouvait une grande satisfaction à voir une adolescente aimer lire et il aimait beaucoup prêter ses livres, surtout à quelqu'un de motiver par la lecture.

« Tu as dix-sept ans, c'est ça ? Donc cela fait dix ans que tu es ici, dit-il, pensif. Tu dois connaître cette orphelinat comme ta poche. Moi, il me semble étranger pour le moment, après tout cela ne fait que quelques mois que j'enseigne ici. »