29 ans - 16 avril 1963

Lorsque vous voyez Rebecca, vous vous dites « yeux ». C'est vrai, c'est ce que l'on remarque le plus chez elle. Ses pupilles noisettes se distinguent par la pâleur de sa peau, qui peut paraître cireuse lorsque le soleil n'est plus présent, des pommettes hautes, des lèvres fines qui ne se tordent jamais en un sourire, et une masse de cheveux bruns qui lui retombent lourdement sur les épaules. Oui, c'est ainsi que l'on peut qualifier la jeune femme. Elle n'est pas souvent habillée avec élégance, se contentant de la plus grande simplicité. Elle a des courbes douces, des jambes bien galbées par contre, et sa démarche n'évoque pas celle d'une reine. Elle n'a jamais été très souple et présente quelques rondeurs au niveau des hanches, mais n'a jamais eu de complications par rapport à ça.

Rebecca est quelqu'un de difficile à cerner. Elle a toujours été solide, plus que vous ne le pensez, et est assez dure avec les enfants, et même avec tous les gens qu'elle croise. Elle n'est pas du genre à m'émouvoir pour un oui ou pour un non, bien au contraire, et elle ne se fie jamais aux apparences. La vie lui a appris à se méfier, elle est constamment sur la défensive, ce qui lui vaut bien des rivaux. Elle ne s'en tire jamais très bien en ce qui concerne les émotions et les larmes, elle n'est pas douée pour ça et pas du tout disposée à consoler quelqu'un, même cher à ses yeux. Si quelqu'un la déteste, elle détestera cette personne, sans pour autant lui faire des coups bas ou l'embêter en douce. En revanche, si on la provoque, elle sait se montrer dévastatrice, et détruire la vie des gens, c'est son activité favorite. Elle est en outre très adroite de ses mains, car il lui fait bien trouver quelques qualités, et ne se montre gentille qu'avec ceux qui lui ressemblent et qui ne sont pas toujours sur son dos. En somme, c'est quelqu'un de dur, d'ingérable même, qui ne laisse personne lui marcher sur les pieds ou la freiner dans ses objectifs.

Comment peut-on détruire rapidement la vie d'un enfant ? Je ne vous donnerai pas la réponse, ça serait trop facile. Les mauvais traitements qu'a subi Rebecca, mais aussi sa sœur biologique, par leurs parents, lui ont laissé des séquelles, assez lourdes, notamment des troubles du sommeil, peuplé de cauchemars. Heureusement, bien vite on les a retirées à leur parent pour le emmener dans un orphelinat, et c'est ainsi qu'une nouvelle vie a commencé. Reb était tranquille mais ne pouvait toujours pas dormir sans revoir les scènes affreuses qui hantaient toutes ses nuits, le sang, les plaies à vif, les coups répétés, sans cesse, encore, toujours...

Et puis un jour, c'est arrivé. Des gens ont emmené sa sœur pour qu'elle ait une nouvelle vie, et ce jour, la fillette ne l'a jamais oublié. Pourquoi pas elle, l'aînée ? C'était légitime d'être adoptée elle et non sa cadette puisqu'elle avait ce droit, ce droit inestimable que lui avait offert la nature. Une profonde jalousie vint prendre possession de son quotidien. La colère et la rage n'y purent rien, mais ce fut bien l'envie qui lui fit se souvenir de ce jour, de cet instant où le couple avait considéré sa sœur, et l'avait choisie, elle. Elle et pas Rebecca.

Cette dernière se mit donc en tête de la retrouver de lui faire payer, ou du moins d'essayer de la faire monter contre ses parents adoptifs, qui au final étaient la cause de tout. Elle ne supportait pas de revoir le visage de sa sœur dans son esprit, de la revoir suivre ces deux inconnus, de faire ses affaires et de partir sans même un au revoir. Cela ne lui avait pas brisé le cœur, non, mais cela l'avait déchiré, jeté à terre, et écrasé, à l'infini. Haine, rage. Chaos.

Rebecca, après être sortie de l'orphelinat, a mis du temps avant de retrouver sa benjamine. Tellement de temps qu'elle s'apprête à peine aujourd'hui à entrer prendre ses fonctions au pensionnat, oui au pensionnat Moor. Elle compte bien manipuler sa sœur, calculatrice comme elle est, et lui faire payer, payer, payer. Parce que sa sœur, elle se nomme Spencer Filds, et elle n'a qu'à bien se tenir.