Je grimace. Je titube dans les ruelles du village en me dirigeant vers la base. Quoi qu'est ce que j'ai fais encore ? Putain mais pas grand chose pour une fois ! J'ai empêché un gamin de se faire tabasser par cinq soulards c'est tout ! Sauf que, en vérifiant que le gamin allait bien, j'ai pas fais attention et j'ai baissé ma garde. Résultat, je me suis pris un coup de couteau dans la jambe. Rien de grave, j'ai déjà vu pire, mais ce n'est jamais agréable. Puis avec la fatigue, je commence à voir trouble, je vous avouerais que j'ai peur de me prendre un poteau là quand même. Je suis même pas sûr de le voir AVANT de me le prendre. Ce qui serait très classe tiens. T'as raison Stu', rentres à la base avec une plaie sûrement suintante et dégueulasse à la jambe ET une bosse en plein milieu du front. T'auras pas l'air con du tout tiens. Et Alan se foutera pas du tout de ta gueule non plus en bonus.

Je soupire et plisse les yeux pour tenter d'éclaircir ma vue en voyant une silhouette arriver face à moi. Non mais il y a pas moyen. Mon corps à décidé de me faire chier et tout ce que j'essaie de faire loupe. Je continue pourtant de m'avancer, bien décider à l'ignorer et regagner la base au plus vite. De toute façon vu mon état, ça vaut carrément mieux. Je n'arrive pas à comprendre clairement ce qu'elle veut me dire. Oui. Bon. Je crois que mon corps est en train d'arriver à ses limites. La blessure que j'ai à la jambe gauche, c'est juste la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Avec le manque de sommeil, tout ce que je veux faire pour aider à la base (quitte à faire du surmenage), les restrictions que je m'impose pour faire des économies de nourriture... C'est encore d'avoir des répercussions sur moi. De grosses répercussions visiblement. Je finis par m'écrouler assis contre le mur avec lequel je m'aidais pour avancer. Je regarde la silhouette aux traits flous qui se tient devant moi. Rien à faire. J'arrive à peine à savoir que c'est une fille et qu'elle est blonde. Et qu'elle essaie de m'aider visiblement. En fermant les yeux en espérant pour que ma vision soit plus claire quand mes paupières s'ouvriront à nouveau, je murmure avec difficulté :

"-Merci..."

Je ne comprends pas ce qu'elle me dit. Tout se mélange dans ma tête et je n'entends que des bruits lointains qui doivent sans doute être des paroles. Je ne ré-ouvre pas les yeux, attendant simplement. Durant quelques instants, le silence retombe autour de moi. J'en profite pour réguler ma respiration et faire le vide dans ma tête. Je repense aux visages d'Adé, de Nico et les autres. Je tentes de m'en souvenir avec le plus de détails possibles. Ça m'a toujours calmé de me rappeler le visage de ceux qui ont composé ma vie. Je réussis plus ou moins à me calmer et grimace légèrement lorsque quelques gouttes d'un liquide se déversent sur ma plaie. Ça me brûle, mais à la sensation, je sais qu'il faut en passer par là. C'est sûrement du désinfectant ou de l'alcool. Alors que je sens ma plaie être couverte, je papillonne des paupières. Ma vision est plus claire que tout à l'heure. Assez pour que je détaille la jeune fille qui m'est venu en aide en aide en tout cas. Je lui fais un petit sourire, incapable d'en faire plus et la détaille. Un visage harmonieux, des cheveux blonds/châtains et des yeux d'une couleur indéfinissable. Elle est plutôt mignonne. Enfin, gentille surtout vu ce qu'elle vient de faire pour moi. Je répète une nouvelle fois :

"-Merci."

Cependant, par les temps qui courent, son attitude m'intrigue et je m'attends à ce qu'elle me demande quelque chose en retour. Moi, avoir peu de foi en l'espèce humaine ? Noooon. Simplement, depuis la tempête, les gens ont tendance à faire beaucoup moins de choses gratuitement. Personnellement, je fais comme je l'ai toujours fais. J'aide sans rien attendre en retour. Le meilleur moyen de ne pas être déçu. Alan me traite souvent de gros chamallow, selon lui c'est ce que je suis une fois qu'on a réussi à passer mon malaise envers le reste de la société. Alors petit un, JE SUIS PAS GROS ! Et petit deux, je l'emmerde. Nah mais oh. Je finis par demander en la fixant :

"-Pourquoi tu fais ça...?"